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DUALITE

Quel est le sens De ce profond silence, Ces murs de pierres Que je voudrais casser, En moi, je n'ai la force d'y arriver. Entre les choses que je voudrais faire Mais que je ne sais plus faire J'atterris direct au seuil de l'enfer, Mes ailes se sont brisées Au contact de la terre, Semblables à un avion écrasé Au milieu d'une paisible rivière. Entre ce que je voudrais taire, Ce que les autres ne savent pas, Barricades et barrières Cachant mon obscur désarroi. Quel est le sens De ce profond silence ? Ne surtout pas déranger Ceux qui sont dans l'ignorance. Moi-même, je ne sais plus qui je suis. Comment répondre à leurs souhaits, A leurs attentes, à leurs messages. De prendre le large, est mon unique envie, Face aux tourments, afficher un déni, Me reposer, décrocher mon badge, Poser mon lourd et encombrant bagage, Laisser de côté mes soucis de santé, J'suis juste gravement fatiguée Du métro-boulot-dodo, j'suis en nage De courir, de me presser, de me soucier D'organiser pile-poil mes journées, De la liste des courses à la pause déjeuner, De la famille, des amis à ne pas délaisser. Et puis faire plaisir, avec mon coeur, Parce que jadis, on me l'a appris, Commettre le moins possible d'erreurs, A tout prix, aux antipodes de l'ennui, Des jours ternes aux terreurs de la nuit. Quel est le sens De ce profond silence ? Si vous saviez seulement qui je suis ? Le sais-je seulement moi-même ? Entre ce désir masqué de plaire, De ne pas exagérément décevoir, Du style "j'suis la femme qui gère, Jusqu'à de l'ordre dans mes armoires", Cela m'fatigue à long terme. J'occulte les fards et les miroirs, Je suis comme je suis... J'avoue même qu'il y a de ces soirs Où j'ai vraiment envie De dormir, dormir, dormir Mais j'ai en moi cette peur de mourir Lorsque mon âme vient à s'endormir, Et le ciel à s'assombrir. Désespoir, oh désespoir... Alors, je me dois de vous parler, raconter, Dire la stricte et pure vérité Quitte à me retrancher de la société. Laisser en moi entrer la paix. Ces mots tus, ces secrets bien gardés, Ces non-dits, les laisser vagabonder. Et puis il y a le poids de la culpabilité, Cette idée, cette tendance à mal faire, De ne jamais en faire assez Même si au final tout est sincérité, Et que je suis guidée Par une très saine curiosité. Il y a aussi la passion qui s'est invitée, Essence digne de créativité, Celle qui se plaît à découvrir, imaginer. Un vrai méli-mélo somme toute imagé. Et les années qui passent à regarder En arrière, à se plonger dans son passé. Que c'est con, les photos, les clichés, Tous ces souvenirs dépassés et amers Surannés, à larguer au bord de la mer Pour mieux légèrement avancer.

photo de Véronique Gresse


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