A COEUR VAILLANT...

Ce matin, mon bon garçon, nous n'irons pas pêcher, Les bords de l'étang, de givre, en sont clairsemés. Le soleil se lève sur la Sologne, un décor ouaté Se dresse à l'horizon; chausse tes pesants souliers.

Nous nous en irons nous y promener, sans gêne...

La saison est passée pour honorer le brame du cerf, Hâtons-nous aux plaisirs culinaires, sortons le couvert. Le potager se repose enfin et les roses du jardin Obstinément closes, les paupières lourdes de chagrin.

Renaîtront leurs boutons parfumés en temps et en heure...

Afin d'alimenter le feu de cheminée, fendons le bois en dés, Battons de nos pas les sentiers humides de la forêt. Attendons le retour du printemps et des oiseaux, le chant. Ecrivons nos poèmes sous la chandelle du mimosa odorant.

Voire même, éclairer la lanterne sous la gouverne d'un Sauternes...

Rendons visite à Tante Berthe, l'oeil et le corps si peu alertes, Tapons le carton au coeur de l'unique estaminet en fête, Un petit coup de rogomme, ça vous r'fait un bonhomme Tandis qu'au pied des arbres, les téméraires s'endorment.

La nature reprend ses droits de toute manière...

Sans plus attendre, instaurons de crapuleuses ripailles ! Même si le ciel est aussi triste qu'un jour de funérailles. Saignons le cochon au diapason, la chasse à la courre Reviendra tôt à point nous flatter de ses yeux de vautour.

Il faut bien trouver du réconfort, ailleurs...

Il reste aussi des livres à ouvrir ou le repos du guerrier Selon... Que le corps exulte, car il n'y a pire péché Que d'occulter ce qui a fait de nous ce que nous sommes, Des mères, des tombes ployant sous les os des hommes.

J'ai subodoré, jadis, vivre centenaire...

Je ne sais quoi ajouter de plus qu'un morne soupir. Des sanglots aussi longs qu'un âpre souvenir. Que le jour semble triste lorsqu'il paraît mourir. J'ai appris que l'espoir ne semblait jamais mentir.

Enfin, j'entends retentir les battements de mon coeur...

D'après une très belle photo de Patrice Touchet, publiée avec son autorisation.