top of page

UN ACTE D'AMOUR

  • florencequoilin18
  • 7 oct. 2017
  • 2 min de lecture

Jacques, de ma plus frêle écriture, De mes mains fines et tordues, Aux veines noires et distendues, Mon époux, mon amour éperdu, Je t'écris cette bien triste lettre. Oui, j'aimais la vie, cette aventure formidable. Mais elle m'est devenue insupportable. Je me souviens des jours où tu me tenais la main, De nos promenades; comme tout me semble si loin. Je pourrais aussi en réciter une tirade, Une pièce de théâtre au détour d'un boulevard, Verser l'encre de mon sang à même le buvard, Alimenter moult racontars de soiffards bavards. Je me remémore, nos pieds dans l'eau, Nos pas unis dans le sable, nos jolies balades. Aujourd'hui, je suis désormais une femme malade, Un quidam sans âge. J'ai le coeur marmelade. La polyarthrose a pris en moi, la pose. Elle ne m'octroie décidément aucune pause. La maladie s'est infiltrée tel un poison Dans les interstices feutrés de mon être Me calfeutrant telle une femme, à sa fenêtre Et tu es malgré toi, le gardien de ma prison. Le temps s'écoule et j'ai de plus en plus mal. Ces douleurs, personne ne peut les comprendre. De l'avenir, je me dis ne plus rien en attendre Mais je ne veux pas crever comme un animal, Tel un oisillon piégé au sein d'une reginglette. Par pitié, Jacques, délivre-moi du mal...

Ma Charlotte, j'ai bien lu ton récit. Je suis affolé, abattu, ému, ébranlé... Que pourrais-je faire pour te soulager ? Tu connais les lois, les règles, ma foi. Tu sais à quel point en Dieu, je crois. Mais bon puisque tu me le demandes Je ferme les yeux, alors que je me réprimande, Je t'offre la délivrance en guise d'offrande Pour qu'enfin, ce profond sommeil te rende Le coeur apaisé, ton âme qui se transcende. Je me doute être condamné au final, D'être cloué au pilori par le tribunal. Je finirai en taule sous le joug de mes geôliers, Côtoyant au passage des brigands, des écorchés, Les rebuts de notre blâmable communauté, Des bourreaux d'enfants, les pires meurtriers. J'aurais exaucé tes voeux, tes souhaits Me souvenant que, jadis, je t'ai épousée Pour le meilleur et pour le pire, Et ce, jusqu'à ton dernier soupir.

D'après une très belle photo de Christian Molitor, publiée avec son autorisation.


Comments


© 2023 by The Book Lover. Proudly created with Wix.com

  • Grey Facebook Icon
bottom of page