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DIEU QUE C'EST BEAU !

  • florencequoilin18
  • 15 avr. 2017
  • 4 min de lecture

Nous ne nous étions plus rencontrés depuis un certain temps, un temps qui m'a semblé être une éternité. Certes, j'aurais pu forcer les portes de la destinée mais j'ai entre-temps appris la patience. La patience est la mère des vertus mais aussi un Art suprême, un jardin à entretenir au jour le jour. Parfois se faire violence; savoir attendre pour mieux savourer. Ici, en l'occurrence, j'avais raison... Donc Jacques, depuis sa dernière visite à mon domicile, était quelque peu sorti de mon existence. J'avais bien envie de l'appeler sur son téléphone portable mais qu'aurais-je eu de plus à lui narrer ? Me justifier quant à mon choix de solitude; lui avouer que je ne ne pourrais jamais le rejoindre dans ses élans amoureux mais encore... Juste dire que le confident de mes états d'âme me manquait éperdument, que sa seule présence, telle une lumière dans des esquisses d'hiver tristes et monotones m'apportait beaucoup de joie et de bonne humeur. Alors je cherchais dans les tréfonds de mon "moi intérieur" des sources de plaisir à travers des souvenirs récents de balades forestières ou encore de courts séjours qui m'avaient beaucoup plu. J'en avais gardé l'éclat et les étincelles, je m'en sustentais désormais. Alors que je franchissais la porte de la taverne où si souvent, nous nous retrouvions, j'ai bel et bien aperçu la silhouette de Jacques à travers la lourde fenêtre en verre. Il était attablé, seul. Son visage chafouin et son nez aquilin étaient reconnaissables entre mille. Jacques n'était pas un homme attirant physiquement mais ses qualités humaines me plaisaient et captaient mon attention, à chaque instant. Je me suis donc empressée, les cheveux mouillés, car il pleuvait avec fracas, les pieds trempés et ma tenue quelque peu en désordre, d'entrer dans "Notre" établissement. Les hommes présents m'ont saluée et je me suis avancée vers Jacques. J'ai vu briller des étoiles dans ses yeux. Son regard était pétillant; pour peu, j'aurais cru qu'il m'attendait. Il portait son pull écru, celui dont je disais qu'il flattait les peaux hâlées. Il lui allait bien, Jacques avait fière allure ! Il m'a souri et je lui ai rendu son sourire. J'étais heureuse ! Comme quoi, il suffit de peu. Je me suis dressée face à lui et j'ai commandé un verre de vin blanc après avoir ôté ma veste. Jacques buvait son thé fruité, comme toujours. Nous avons discuté longtemps et nous avons convenu d'un rendez-vous prochainement. Non, nous ne passerions pas Noël ensemble. Jacques était invité chez sa fille adoptive. Et qu'étais-je en fait pour lui ? Un espoir de conquête ? Une femme dont il appréciait la compagnie ? En fait je ne l'ai jamais vraiment su... Dans son imprévisibilité, Jacques m'a demandé ce qui pourrait me faire plaisir, comme "cadeau". Nous étions à l'orée de Noël. Beaucoup de femmes auraient répondu : un bouquet de fleurs, une bouteille de parfum, un collier de perles, un dîner au restaurant mais je lui ai déclaré de but en blanc : prendre le train avec toi et partir à la mer. Les sourcils élevés, il a opiné de la tête et a acquiescé. Je n'en revenais pas. J'ai songé qu'il allait changer d'avis. Il m'a demandé quel jour j'avais congé, et je lui ai répondu que j'aimais trop le dimanche que pour me perdre dans la banalité d'un autre jour, que je désirais à tout prix retrouver cette atmosphère de tranquillité du silence dominical. Et nous avons convenu de partir à la mer, en train, le dimanche à venir. Quelques jours se sont écoulés depuis notre rencontre et nous voici sur le quai. Il y a de la magie dans l'air ! Le ciel est bleu et les premiers frimas se sont installés. 5° au compteur. Nous partons bras dessus, bras dessous et nous nous asseyons l'un en face de l'autre dans le compartiment n° 2 du train qui nous emmène à la mer du Nord. Jacques émet le souhait de se rendre à Knokke-Le-Zoute. Moi je trouve cet endroit présomptueux mais bon, si c'est son choix... Après de tendres conciliabules et des discussions quelque peu animées et stériles, nous arrivons, enfin à bon port. Heureusement que nous étions partis à la bonne heure ! A peine extraits de notre locomotive que nous nous imprégnons des parfums iodés de la mer du Nord et du cri des mouettes, obstinant. Subrepticement, nous nous donnons la main, comme deux enfants. Après tout, où est le mal ? Jacques préconise de prendre le tram et ce qu'homme désire, femme ne daignera se laisser aller à un soupir ... Donc nous grimpons dans ce tram qui nous emmène à Knokke-Le-Zoute. Je me hasarde à aimer écouter le bruit de la sonnette qui roucoule. Il y a bien peu de touristes présents. Comme nous sommes bien, hors saison ! Hors du temps, hors connexion. Et alors que nous arrivons et scrutons l'horizon, j'aperçois les larmes rouler sur les joues de Jacques, je capture au gré du hasard son émotion et le blottis dans mes bras. Un bonheur ineffable s'empare de nous; une tendresse si particulière qu'elle est très difficile à décrypter. Sur la pierre dure et froide qui se couche à nos pieds, au bord de la digue, nous décidons de camper et d'occuper tout l'espace. Nos yeux ne contemplent plus que les vagues qui s'enroulent, la clarté, le soleil, la beauté d'un site qui semble être inhabité, cette pureté dont on aurait pu rêver si elle n'avait jamais existé. Et alors que le cri des mouettes déchire le sommeil de ce qui nous entoure, Jacques me dit : "regarde, petite, au loin, comme ils sont beaux les bateaux. Il manque juste un coucher de soleil... "...

Et arrive alors la photo de Nicole Boxberger, publiée avec son autorisation.


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