BULLE NOCTURNE

LAURENCE CHABALIER 1

"Il n'y a pas d'hasard, juste des rencontres, Pas d'amour heureux, ni gestes qui comptent. Toujours rester en éveil et se remettre en question Ne pas subir les doutes ni les abnégations. La terre ne sera jamais assez ronde ni féconde. Croissants de lune, crépuscule à l'horizon, Les teintes bleues et roses s'harmonisent, De bien curieuses fiançailles en somme. Retenir entre ses doigts les grains de sable ingrats Tels des minutes qui s'égrènent au mépris des nuits Où les noctambules s'étreignent sous la pluie. La magie de ce silence qui se balance dans l'obscurité, Les méandres du passé, l'esquisse du jour qui se dessine, Quatre heures du matin, n'avoir qu'une seule envie, Poser les doigts sur le clavier et se laisser emporter. Parer l'aube claire d'une étincelante émotivité. A n'avoir rien à ajouter. Au loin, je devine les étoiles Elles scintillent de ce que je suis inanimée, parfois. Juste dire que l'écriture est le miroir des absences. Déjà un siècle que le sommeil m'a délaissée Et dire que tout est parti d'une crampe à la jambe, D'une douleur si intense que j'ai décanillé De mes draps froissés, de mes rêves inhabités. Juste ouvrir la fenêtre pour capturer un peu d'air Le monde s'est tu; aucun quidam ne passe, les oiseaux Se sont cachés dans les feuilles des arbres touffus. Le parfum des roses vient taquiner mes narines. Derrière le noisetier, se dressent les vergers Où pommes, poires et noix tombent dans les paniers. Les champignons chapeautés s'emparent du décor Des mousses et senteurs et la clairière dort. Au lointain, le clocher de l'église tel un dernier soupir Semble conspirer avec le vieux badaud cané. Il fait claquer ses sandales au détour d'un chemin, Je le vois qui détale, acoquiné de son chien. D'égarement en errances, je pense peut-être bien Qu'enfin, le demi-sommeil revient... ♬ ♪ ♩ ♭ "

D'après une très belle photo de Laurence Chabalier, publiée avec son autorisation.