SENTIMENTS DISTINGUES

richard duret

"Alors que les pages du journal de notre vie se tournent, au mépris des années qui s'écoulent, de nos tourments, de nos errements, de notre désespoir, parfois, alors qu'on pense avoir tout connu, tout subi et tout appris, il n'en est rien. Notre avenir s'esquisse, tantôt à la naissance de l'automne de notre vie, bientôt à l'hiver de celle-ci. Il a juste fallu que Dame sagesse arrive à se frayer un chemin de traverse jusqu'à nous. Notre jeunesse, les jeux de l'enfance, notre insouciance, notre innocence, les feux de notre indolence se sont tus. Mais peu importe, il est de notre devoir d'avancer, d'évoluer, de créer, de conjurer, d'imaginer, de partir à la rencontre du monde, de l'Univers qui, à mon sens, ne sera jamais assez grand pour nous accueillir. Alors que mes yeux sont plantés dans les tiens, mon Amour, que mes bras t'enlacent et t'entourent, que mes mains se réchauffent au contact des tiennes, qu'elles caressent ta chevelure si douce, je me pose tel un papillon bleu au creux de ton coeur et me blottis tendrement à même ta patience et ton espérance. Je perçois ta chaleur, la clameur de tes sens. Mon émotion est palpable et dense et au détriment de mes absences, il arrive que je me hasarde et me lance... Alors que tu me téléphones et me pleure, je sais, je prends garde, même si je ne peux te promettre le retour des beaux jours alors que l'été est à sa perte, que l'hiver, à peine, ce pervers, nous inonde de sa froideur et nous hébète ! Oh oui, j'ai hâte de te revoir... Te serrer contre moi, te dire ces choses qu'on ne dit pas et que personne ne doit savoir. Toi qui me supplies, alors que d'un pas, je m'éloigne chaque jour un peu plus de toi... Pourquoi ? Parce que je ne puis pas... Lorsque je t'évoque et me dévoile à toi, que je m'égare, une bienveillante tendresse s'empare de mon âme, je me pâme, je ne sais plus répondre de moi, juste que j'aurais pu penser avoir trouvé la foi alors qu'en Dieu, je ne crois pas. Je ne sais combien de temps, je vais résister à l'idée de répondre à tes égards, tes regards audacieux, tes petites histoires qui me font tant rire et emplissent mon existence de joies et de plaisirs intenses. Pour peu, je te laisserais bien languir mais je ne désire qu'en aucune manière, tu souffres le martyre. Alors au feu diable et satyres ! Créons une bulle où nous pourrions nous extraire de ce monde curieux et hostile; où tout semble être artificiel et puéril; ôtons notre manteau de pacotille, aimons-nous, flattons nos pupilles, inventons-nous des rêves à n'en plus finir, éteignons la télé, déconnectons-nous de cette déconcertante irréalité ! Alors que les pages de notre vie se tournent, plaçons des signets pour nous y retrouver. Arrêtons le temps, buvons jusqu'à la lie l'élixir de nos sentiments".

D'après une très belle photo de Richard Duret, publiée avec son aimable autorisation.